Couverture : Portrait de Harry Melvill (1904), par Jacques-Émile Blanche. University College, Oxford.
6€99
Roman, broché, 124 pages.
« Je l’écoutais avec inquiétude : il n’y avait plus assez de lumière en ce monde pour me rendre clair ce qu’il y voyait. Afin de détourner le cours de ses pensées je lui demandai pourquoi il m’avait expédié cette photographie.
— Pour rien, me répondit-il. Pour connaître l’impression qu’elle ferait sur vous. Moi, aussitôt que je contemple cet Apollon toute la lumière est en perdition dans mon regard comme une tourterelle dans les yeux d’un serpent. Je verrai bien si j’ai eu tort de croire qu’il me sera facile de juger mon trouble quand je vous l’aurai fait partager. »
Sous la plume de l’étrange Joë Bousquet (1897-1950) se tisse ici un dialogue d’un socratisme noir entre un médecin et son patient qui, ayant renoncé à écrire un ouvrage sur « l’aimer et le connaître », fait de son interlocuteur l’objet d’une redoutable entreprise manipulatrice, élaborant un livre vivant dont l’âme et la chair de l’autre deviennent, à chaque ligne davantage, les proies.
Joë Bousquet